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Ce livre qui vient tout juste d’être publié par la Revue marocaine d’administration locale et de développement (REMALD) sous le titre de « Interpellation sur les réformes : rôle de l’intelligentsia» interpelle les consciences. Une question nodale traverse l’ouvrage, celle de savoir ce que font les intellectuels pour que le Maroc change. La réponse tombe comme un couperet et l’auteur ne s’embarrasse pas de circonlocutions pour décrire l’émergence d’une intelligentsia qui, soutient-il, ne fédère plus personne, plus habituée aux palaces climatisés qu’aux prises de position objectives.
« Dans la réalité, l’arène est occupée par des pseudo-intellectuels poussés par la passion et le désir de jouer les beaux-esprits ; ils feignent de consacrer leurs vies à la quête du savoir, alors qu’ils se contentent de banalités sans valeur, tout en croyant avoir atteint la pointe extrême de la recherche. En effet, ces intellectuels refusent de reconnaître la décadence de l’enseignement et de l’éducation, de faire face à la ruine culturelle, à la misère et au chaos du vécu quotidien ; ils sont plutôt friands de séminaires dorés dans les hôtels de luxe et ils sont gourmets des restaurants gastronomiques et autres distractions… sans oublier que certains, parmi eux, continuent de se cacher derrière un gauchisme résiduel et derrière des bondieuseries «écologisantes», détours qui pervertissent la quête d’authenticité et qui permettent d’éluder les questions cruciales», écrit Mohammed Haddy qui ne va pas se faire que des amis. La charge est violente. Elle a aussi le mérite de pointer une réalité amère. Le métier d’intellectuel n’existe plus en terre marocaine. L’intellectuel marocain n’est plus ce nécessaire aiguillon qui fait réfléchir les décideurs et fait avancer le débat. Il n’est plus non plus cette mauvaise conscience de ceux et celles qui nous gouvernent, décident de l’avenir des Marocains, promettent des lendemains qui chantent. Tout est-il pour autant perdu ? Nos intellectuels ont-ils définitivement succombé aux sirènes de la compromission ? Se sont-ils départis de toute conscience réformatrice ? Ont-ils définitivement tourné le dos à la réflexion et aux grandes questions qui entravent le développement ? Non, répond Mohammed Haddy, mais à condition de jeter aux orties les cartons d’invitation et fuir les tentations compromettantes, et ce pour regagner la confiance des citoyens. «Le métier de l’intelligentsia doit redevenir le grand avertisseur pour rappeler aux décideurs leur devoir d’esprit réflexif, afin qu’ils se départissent du compromis louche et travesti. Aussi, faut-il, dans une logique constructiviste, que l’intelligentsia apostrophe, chapitre, bouscule ; il lui est demandé -pour regagner la confiance des citoyens- de jeter les cartons d’invitation, de fuir les tentations compromettantes, sachant que ce qui est gratifiant sur l’instant, peut être ruinant pour la société à long terme », soutient l’auteur de « Interpellation sur les réformes : rôle de l’intelligentsia ».
Force est de le constater. Au Maroc, la transition démocratique n’a pas eu droit à sa « movida ». La revendication de la démocratie n’a pas été portée ni par les intellectuels ni par l’élite culturelle. La nouvelle Constitution adoptée en 2011 n’a pas changé la donne. Plus grave encore, l’intelligentsia marocaine observe un silence assourdissant face aux reculs provoqués par un gouvernement conservateur conduit par l’islamiste Abdelilah Benkirane et sous l’ère duquel les acquis démocratiques sont sans cesse menacés.
Le livre que signe Mohammed Haddy est essentiel. Ceux qui détestent la langue de bois vont être servis. Quant à tous ceux et celles qui ne comprennent pas la posture de spectateurs des intellectuels de notre pays, ils auront des clés de compréhension implacables. A la fin de leur lecture de « Interpellation sur les réformes : rôle de l’intelligentsia », il y a fort à parier qu’ ils ne regarderont plus de la même façon cette élite lettrée et cultivée qui préfère les parapluies au risque de l’engagement.